La paroisse St Philippe d’Abobo–Sagbé
« Peut-il venir de Nazareth – Abobo-Sagbé – quelques chose de bon ? »
Comme Nazareth au temps de Jésus le quartier « Abobo Sagbè derrière rails » est considéré à Abidjan comme l’un des quartiers les plus précaires, sinon dangereux et mal famé de la ville. Que peut-il venir de bon d’Abobo-Sgabé se demandent les plus riches habitants du Plateau ou de Cocody ? Une question qui rappelle bien cet épisode de l’Evangile rapporté par Jean (Jean 1:46) quand Philippe rencontra Nathanaël, et lui dit: « Nous avons trouvé celui de qui Moïse a écrit dans la loi et dont les prophètes ont parlé, Jésus de Nazareth, fils de Joseph. Nathanaël lui dit: Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon? Philippe lui répondit: Viens, et vois »
La paroisse d’Abobo Sagbé, tire son nom, Saint Philippe, de cet épisode évangélique. Ce quartier est né en réalité sans ordre, ni projet urbain au fil des années et de l’afflux des migrants venus de toutes les régions et ethnies du pays (Baoulé, Agni, Attié, Ebrié.. Guéré, Yacouba, Bété, Dida… ou Dioula, Senoufo etc.) Mais aussi de l’étranger, Burkinabes, Maliens, Guinéens, Mauritaniens. L’endroit s’est spontanément organisé sans aucune planification municipale jusqu’à accueillir aujourd’hui plus de 50 000 personnes. Du point de vue religieux, Abobo Sagbé est majoritairement musulman et l’on compte nombre de mosquées pour quelques églises chrétiennes, dont notre Eglise St Philippe et diverses communautés protestantes évangéliques avec lesquelles nous entretenons de forts liens fraternels.
Le quartier est essentiellement composé de ce que l’on qualifierait en Europe de « travailleur pauvres », artisans, maçons, menuisiers, employés de maison etc. Mais l’élément le plus caractéristique de cet espace, qui frappe tout visiteur, est bien la jeunesse des personnes qui vivent ici. Une masse de jeunes pour la plupart désœuvrés, plus des trois quart d’entre eux sont sans emplois ou dans le sous-emploi d’activités précaires et mal rémunérés. Autre défi d’importance, l’éducation des enfants et l’école. Dernière caractéristique du quartier, le très fort taux d’analphabétisme en particulier chez les femmes.
Soulignons aussi que la crise post-électorale qui a affectée la Côte d’Ivoire de décembre 2010 à avril 2011, n’a pas épargné cette commune. Abobo est peu à peu devenu l’épicentre du conflit. Les habitants ont été durement affectés : pillage, couvre-feu, assassinats, proches disparus, violences… etc. Le quartier Sagbé s’est vidé vers la fin mars 2011 de près de 90% de sa population qui est rentrée progressivement après la fin du conflit. Les plus touchés furent sans conteste les jeunes et les enfants.
Ils représentent en réalité un poids démographique important, mais ils sont souvent oubliés dans la planification des politiques, dans les programmes ou la fourniture des services. La pauvreté des familles fait qu’un certain nombre d’enfants ne disposent pas de livres dans les matières de base. Il n’existe pas de bibliothèques scolaires et rien n’est prévu pour les activités parascolaires. Certaines salles de classe sont mal éclairées ou pas du tout. Inutile de préciser enfin que l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication n’est pas encore à l’ordre du jour dans les écoles du quartier.
Comment faire entendre l’Evangile de la Grâce dans un tel contexte, sans prendre en compte et tenter de remédier aux maux des frères et des sœurs qui peuplent ce quartier ? C’est pour cette raison que dès l’origine notre paroisse a décidé de construire une école primaire. Notre école St Philippe entend donner une formation de qualité à moindre coût aux enfants de cette zone défavorisée. Puis un centre Caritas, un dispensaire et divers lieu d’accueil et d’écoute…
Seulement, nous manquons encore cruellement de moyens, en particulier en direction des enfants. Nous souhaitons donner à ces enfants des conditions optimales afin de permettre à cette école de devenir non seulement un lieu de référence pour le quartier, mais aussi au-delà.
Le projet que nous portons aujourd’hui vise à doter la paroisse, d’une nouvelle école maternelle, et d’un centre de santé regroupant sur un même site, un dispensaire, un laboratoire d’analyse médicale et une pharmacie. L’accès aux soins sera ainsi accessible aux habitants de la commune. À moyen terme, une bibliothèque et la rénovation et l’extension de notre école pourraient également voir le jour. La première étape du projet sera la construction de notre maternelle. Juste après viendra la construction des bâtiments du centre de santé. Il est de même prévu de mettre en chantier un forage pour alimenter enfin le quartier et notre paroisse en eau potable.
Tous ces projets nous ne pourrons financer avec nos seuls propres moyens. Et nos seules forces. Nous comptons aujourd’hui sur vous et vous lançons un appel. Dieu fasse que vous en perceviez, comme nous, l’urgence et la nécessité.
Serge LOROUGNON, sj
